Poppy ~

Les lamentations de l'écrivain

Clive Barker écrivait que les morts avaient leur propres artères de circulations, "infaillibles alignements de trains, de rames de rêve, à travers la désolation qui s'étend derrière nos vies"... qu'ils nous hantaient, aussi, et pouvaient faire de nous comme un livre de sang portant les marques et gravures de leurs gloires antérieuses, empreinte invisible de leurs souffrances passées.

Il y a dans les mots quelque chose d'effroyablement sensible et mystèrieux. Les mots, semblables aux morts, disposent de leurs propres artères de circulations, voies invisibles et inflexibles de routes et sentiers immortels, s'insinuant parmi cette fourmilière humaine en expansion. Il y a quelque chose de dangereux dans le simple fait d'écrire quelques lettres sur une feuille froissée. Et ces mots, morts feuillages glacés sur du papier, peuvent finalement prendre possession des lieux immaculés sur lesquels vous portez votre empreinte naive et eternelle. Ils peuvent même vous possèder, s'ils le veulent. Ces personnages imaginaires, couchés sur le papier, pourraient d'ailleurs très bien vouloir vous transmettre certaines informations capitales. Leurs voix, subtils échos fait de silences chevrotants et hurlements muets, deviennent dès lors semblables à ces esprits frappeurs de votre enfance, terriblement néfastes, et désireux de voir leur souhait cachés devenir réalité, à travers ce socle corporel que l'écrivain lui offre...